Le commerce obscur des médicaments contrefaits en Afrique de l’Ouest

Le commerce obscur des médicaments contrefaits en Afrique de l’Ouest

26 septembre 2023

En Afrique de l’Ouest, la vente de médicaments contrefaits est devenue une crise sanitaire majeure, dépassant même le trafic de pétrole brut et de cocaïne réunis en termes de revenus. Cette situation alarmante a été récemment mise en lumière par un rapport de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) publié en août 2023, utilisant des données de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Selon ce rapport, entre 20 et 60 % du marché des produits médicaux dans la région sont désormais occupés par des médicaments contrefaits, avec des pics allant jusqu’à 80 % dans des pays tels que la Guinée et le Burkina Faso.

La manipulation des médicaments contrefaits en Afrique constitue un défi majeur pour la santé publique dans la région. Cette problématique est alimentée par une combinaison de facteurs socio-économiques et de lacunes dans les systèmes de réglementation pharmaceutique. En raison de la pauvreté répandue et de l’accès limité aux soins de santé de qualité, de nombreuses personnes en Afrique sont vulnérables à l’achat de médicaments à bas prix sur des marchés informels ou en ligne, sans garantie de leur authenticité. Les médicaments contrefaits, souvent mal étiquetés et mal emballés, peuvent contenir des ingrédients inactifs, sous-dosés ou même des substances toxiques, mettant ainsi en danger la vie des patients. Cette menace est particulièrement grave dans le contexte des maladies endémiques telles que le paludisme, où l’inefficacité des médicaments contrefaits peut entraîner une augmentation du nombre de décès évitables.

Selon le récent rapport de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la prolifération, dans la région, des médicaments contrefaits est le fruit d’une combinaison de facteurs complexes. Tout d’abord, l’instabilité politique et la violence au Burkina Faso ont créé un terrain propice à l’expansion de ce marché illicite. Les frontières poreuses dans la région sont devenus des points d’entrée majeurs pour ces produits contrefaits. Les cadres réglementaires laxistes dans certains pays ont également contribué à la vulnérabilité de ce secteur, les autorités et les travailleurs médicaux étant parfois complices de la distribution de médicaments contrefaits.

Par ailleurs, le rapport attire aussi l’attention sur le processus de production de ces médicaments qui est tout aussi troublant. En effet, les importateurs illicites en Guinée et au Burkina Faso passent parfois des commandes directes auprès de laboratoires légaux et illégaux en Inde, leur demandant de produire des médicaments avec des dosages réduits du principe actif pour réduire les coûts. Cette manipulation met en danger la santé des patients qui croient ingérer des médicaments légitimes. Les médicaments contrefaits les plus répandus dans la région sont les antipaludiques. Cette situation s’explique en partie par le taux élevé de paludisme en Afrique de l’Ouest, qui représente 48 % du marché des antipaludiques provenant de sources illicites. D’autres médicaments fréquemment contrefaits incluent les antibiotiques et les antirétroviraux utilisés dans le traitement du VIH/sida. Les principaux pays d’origine des produits médicaux, qu’ils soient licites ou illicites, présents en Afrique de l’Ouest sont l’Inde et la Chine.

Face à cette situation alarmante, des initiatives ont été lancées pour lutter contre le trafic de médicaments contrefaits en Afrique de l’Ouest. En Guinée, la création d’une brigade d’intervention, suite à la ratification de la Convention MEDICRIME, a permis de saisir une quantité impressionnante de produits médicaux illicites. De plus, le Burkina Faso et la Guinée ont tenté de centraliser leurs marchés pour réduire le nombre d’acteurs impliqués dans la chaîne d’approvisionnement. Cependant, malgré ces efforts louables, le problème continue de s’aggraver. Le rapport de la CEDEAO souligne la nécessité d’une action concertée des autorités nationales, régionales et de la société civile pour faire face à cette crise. Les enjeux en matière de santé publique sont considérables, car les médicaments contrefaits peuvent non seulement aggraver les maladies existantes, mais aussi entraîner des résistances aux médicaments.

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