Des mélanges de senteurs d’épices du Souk de Marrakech aux vastes étendues de nature et leurs animaux emblématiques du Kenya à l’Afrique du Sud, l’Afrique fait rêver. Des 57,8 millions de touristes en 2016, l’Organisation Mondiale du Tourisme estimerait à 134 millions les visiteurs sur ce continent en 2030. Opportunité immense que les grands groupes hôteliers avaient anticipée. Mais depuis 2020, est-ce que la donne a changé ? Quel est le futur du tourisme en Afrique ? Faisons ici un état des lieux de cette industrie qui veut investir le Berceau de l’Humanité.
Les chiffres le montraient depuis une vingtaine d’années déjà. L’attraction pour l’Afrique comme destination touristique ne cesse d’augmenter (53,4 millions de touristes en 2015 contre 62 millions en 2017). Pour les autres, l’industrie du tourisme représentait, en 2019, 7 % du PIB du continent, soit 169 milliards de dollars et 24 millions de personnes employées, selon l’Organisation Internationale du Tourisme.
Face au potentiel de croissance de ce secteur, les grands groupes hôteliers ont commencé à déployer des stratégies de conquête. 2019 voit alors les annonces de rapprochements, de constructions, de rachats se multiplier. Sarovar Hotels, d’origine indienne, ouvre la danse en annonçant la création prochaine de nouveaux établissements en Afrique de l’Est, proche du sous-continent indien, anglophone et où la communauté indienne est importante.
Le groupe français Accor Hotel suit dans la danse. Principalement implanté dans le nord de l’Afrique, il veut s’étendre à sept grandes métropoles africaines (Le Cap, Nairobi, Dar es Salam, Addis-Abeba, Dakar, Abidjan et Kampala). Il acquiert en même temps 50 % du capital de Mantis, groupe sud-africain spécialisé dans l’exploitation de lodges de luxe. Les américains Radisson Hotels & Resorts, Hyatt, puis Marriott International suivent, le dernier espérant accroître de 50 % son parc hôtelier en Afrique d’ici 2023.
Et pour finir le tour de piste, une plateforme d’investissement, Kasada Capital Management – collaboration entre Katara Hospitality, d’origine qatarie, et Accor Hotel – est le premier « fonds durable » à investir dans l’hôtellerie africaine, permettant à des partenaires locaux de co-investir, de créer des emplois et de l’entrepreneuriat au niveau local. L’année 2019 est donc pleine d’espoirs et de projets touristiques à travers tout le continent africain.
La crise sanitaire mondiale vient bousculer la donne et permettra de prendre une photographie du tourisme figé dans l’immobilité mondiale.
La crise a mis en avant la dépendance vis-à-vis de l’Europe, l’Amérique et l’Asie pour son apport de touristes. L’offre hôtelière n’est pas assez diversifiée. Elle vise surtout les touristes étrangers, donc aux revenus plus élevés. Les infrastructures sont souvent négligées en dehors des capitales. Les voyages d’un pays à l’autre restent à un coût élevé et avec des formalités de visa qui n’ont pas été simplifiées.
D’un côté plus positif, le secteur touristique a constaté une certaine résilience quand son tourisme intérieur était développé. Certains pays ont commencé à pratiquer des offres ciblées sur leur clientèle locale, comme des tarifs réduits d’entrée dans les réserves naturelles par exemple. La classe moyenne africaine émerge de plus en plus. Elle souhaite voyager. 40 % des touristes internationaux en Afrique, sont africains. La jeunesse africaine aussi est curieuse de découvrir son continent.
Les grands groupes hôteliers devront reconsidérer le type d’expansion qu’ils souhaitent en Afrique en offrant un panel de produits plus large. Offrir des produits au niveau d’entrée du marché, ainsi que des produits de moyenne gamme peut s’avérer une stratégie de choix qui touchera la clientèle domestique, tant du pays que du continent, des jeunes globe-trotters africains, aux familles de la classe moyenne. Et pour qui peut se l’offrir, l’hôtellerie de plus grand luxe doit rester dans le panel d’offres de l’hôtellerie en Afrique, aussi bien pour la clientèle domestique qu’internationale.
L’entrée en vigueur de la zone de libre-échange continentale africaine – ZLECAf, depuis le 1er janvier 2021, devrait être favorable au développement du secteur touristique. Misant beaucoup sur la vaccination anti-Covid, les pays africains attendent le retour des touristes. Et les grands groupes hôteliers pourront voir leurs rêves d’Afrique se poursuivre, car quoi qu’il en soit, accords étant passés et projets lancés, le rêve doit se poursuivre.
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