L’industrie pharmaceutique africaine connaît une transformation majeure, avec l’objectif de réduire sa dépendance aux importations, en particulier celles venant de Chine et d’Inde. Aujourd’hui, le continent produit à peine 3 % des médicaments qu’il consomme, alors que plus de 70 % sont importés. Face aux vulnérabilités exposées par la pandémie de COVID-19, l’Afrique cherche à renforcer sa production locale pour garantir son autonomie sanitaire. Pendant des décennies, les infrastructures pharmaceutiques africaines sont restées limitées en raison de coûts élevés, d’un manque de matières premières et de réglementations fragmentées. Résultat : la majorité des médicaments consommés sont importés, notamment de Chine, qui domine la production mondiale avec des coûts très bas. Cette dépendance a été particulièrement visible pendant la crise du COVID-19, lorsque des restrictions d’exportation ont provoqué des pénuries en Afrique. Cette prise de conscience a accéléré les initiatives visant à développer l’industrie locale et à réduire la vulnérabilité du continent.
Pour renforcer l’industrie pharmaceutique africaine, des mesures stratégiques ont été mises en place. En 2021, l’Union africaine a créé l’Agence africaine du médicament (AMA) pour harmoniser les normes et faciliter la production locale. Cette initiative vise à réduire les obstacles réglementaires qui freinent le développement du secteur. Plusieurs pays se distinguent déjà. Le Maroc, l’Afrique du Sud, l’Égypte et le Nigeria ont investi massivement dans leur industrie pharmaceutique. Le Maroc, par exemple, produit désormais des vaccins localement et attire de grands laboratoires. L’Afrique du Sud joue un rôle clé dans la fabrication de traitements contre le VIH, tandis que l’Égypte renforce sa production de médicaments génériques. Les partenariats internationaux participent également à cette dynamique. Des groupes pharmaceutiques comme Eli Lilly ou BioNTech investissent dans des usines sur le continent, favorisant le transfert de technologies et l’essor d’une production locale plus compétitive.
Malgré ces avancées, plusieurs obstacles freinent encore l’essor du secteur. L’un des principaux défis est l’accès aux matières premières, qui restent largement importées. Cette dépendance limite la compétitivité des entreprises locales et expose les producteurs africains aux fluctuations des coûts et aux ruptures d’approvisionnement. Le financement est également un problème majeur. Construire des usines pharmaceutiques demande des investissements conséquents, et l’accès au crédit reste limité pour de nombreux acteurs locaux. Si certains gouvernements offrent des incitations fiscales, elles restent insuffisantes face aux ressources massives dont disposent les industries chinoises et indiennes. L’environnement réglementaire constitue un autre frein. Bien que l’AMA ait été créée pour uniformiser les normes, chaque pays africain applique encore ses propres règles, rendant complexe la commercialisation des médicaments à l’échelle continentale. Cette fragmentation nuit aux producteurs locaux et décourage les investisseurs étrangers. Enfin, la concurrence des importations chinoises reste un défi majeur. Grâce à une production de masse et des coûts réduits, la Chine domine le marché africain avec des prix imbattables. Pour contrer cela, certains laboratoires africains misent sur l’innovation et le développement de traitements adaptés aux besoins du continent, notamment contre le paludisme et la drépanocytose.
L’Afrique ne remplacera pas la Chine à court terme, mais elle peut réduire sa dépendance en ciblant la production des médicaments les plus essentiels. En 2025, un sommet à Abidjan réunira les acteurs du secteur pour établir une liste de médicaments prioritaires à produire localement, une initiative qui pourrait orienter les investissements vers les segments les plus stratégiques. L’essor des biotechnologies et de la bioproduction représente également un levier de croissance prometteur. Plusieurs entreprises africaines se tournent vers la fabrication de vaccins et de traitements innovants, une tendance qui pourrait donner au continent un avantage compétitif sur le long terme. Si les investissements continuent et que les États mettent en place des politiques adaptées, l’Afrique pourrait devenir un acteur clé du marché pharmaceutique mondial. Avec une réglementation plus cohérente, une meilleure infrastructure et des stratégies adaptées, le continent pourrait voir émerger une industrie pharmaceutique solide et garantir une meilleure autonomie sanitaire pour ses populations.
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