10 ans de dégringolade du Cédi ghanéen face au CFA

10 ans de dégringolade du Cédi ghanéen face au CFA

3 septembre 2022

Les fluctuations entre le franc de la communauté financière africaine (CFA) et le Cédi ghanéen au cours des 10 dernières années sont constamment en faveur du CFA. La monnaie ghanéenne a progressivement perdue sa valeur de change face au CFA

En 10 ans de 2012 à 2022, la monnaie ghanéenne a perdu sa valeur de 203 francs face au franc CFA. En septembre 2012, un Cédi ghanéen valait 271 Francs CFA. Selon les données de marché en date du 17 août 2022, la monnaie ghanéenne s’est beaucoup dévalorisée. Ainsi pour faire une transaction de change entre la monnaie ghanéenne et la monnaie CFA, 68 francs suffisent en échange du Cédi. Le franc CFA, officiellement franc de la Communauté financière africaine, est le nom porté par deux monnaies communes africaines, héritées de la colonisation française et utilisées par quatorze pays d’Afrique constituant en partie la zone franc. Ces monnaies ont cours dans deux espaces économiques différents sur le continent. Le franc de la communauté financière en Afrique est émis par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest pour les huit États membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). 

Le franc de la coopération financière en Afrique centrale est émis par la Banque des États de l’Afrique centrale pour les six États membres de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). En termes d’échange, ces deux monnaies dont les codes sont en partie le XOF et le XAF se comportent de la même manière face au Cédi. L’agence Ecofin constate que le Franc CFA de la Cemac et de l’UEMOA connait une évolution face au Cédi du Ghana. Certes, la valeur du CFA ne dépasse pas encore celle du Cédi mais les chiffres montrent qu’elle s’est considérablement améliorée face à cette dernière. Alors que de l’autre côté, le Cédi perd continuellement de la valeur depuis le mois de novembre 2012. Selon l’Agence Ecofin, le CFA doit visiblement son évolution à la récente crise de Covid-19, la remontée de la valeur du Dollar américain, et les conséquences de l’invasion russe en Ukraine sur l’économie mondiale. Entretemps, le Cédi est confronté aux aléas du marché et peine à se relancer.

Des raisons de l’effondrement du Cédi

La détérioration du Cédi s’explique par le fait que le Ghana multiplie les déficits. Une évaluation datant de 2014, mentionnait qu’en 7 semaines, le cédi avait perdu 4,4 % de sa valeur par rapport au dollar. Et en deux ans, la monnaie ghanéenne a fondu d’environ 40 %. Ce choc rappelle les difficultés que traversent actuellement les monnaies de certains grands pays émergents comme la Turquie, affectées par la nouvelle politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (FED), beaucoup moins accommodante et généreuse que par le passé. Mais pour beaucoup d’experts le cas du Ghana est spécifique. 

Sebastian Spio-Garbrah, analyste en chef au sein du cabinet d’intelligence économique DaMina Advisors tranche sur la question. Il argumente que : « Si la politique de la FED a eu un impact sur les principaux marchés de capitaux, y compris les « marchés frontières » tels que le Ghana, la principale raison de la dépréciation du cédi n’est pas à chercher du côté des États-Unis, mais dans les grands déséquilibres structurels de l’économie ghanéenne. » David Cowan, économiste spécialiste de l’Afrique chez Citigroup, est encore plus radical : « la politique de la FED n’a pratiquement joué aucun rôle dans la dépréciation du cédi. C’est une affaire purement domestique, dont le noyau est le déficit budgétaire. »

Orthodoxie financière indexée

Accra est loin d’être un pays exemplaire en matière de gestion de ses finances publiques. Entre 2011 et 2013, son déficit budgétaire a glissé très rapidement de 5,5 % à 10,2 % du PIB, sur fond de forte augmentation des dépenses, passées de 25 % à 31 % de la richesse nationale. « Le Ghana a adopté, il y a quelques années une nouvelle structure des salaires publics, qui s’est traduite par une augmentation de tous les salaires de 5 % à 10 % », souligne Angus Downie, responsable de la recherche économique chez Ecobank. Pendant ce temps, les cours du cacao, deuxième rente d’exportation du pays, baissaient toujours, atteignant en mars 2013 un niveau inférieur de près de 40 % à celui de février 2011. Les cours de l’or, première source de devises du pays, entamaient eux leur chute en octobre 2012, perdant entre cette date et la fin de l’année 2013 plus de 30 % de leur valeur. 

Au total, selon Sebastian Spio-Garbrah, le manque à gagner s’élèverait à environ 1 milliard de dollars, soit 728,6 millions d’euros… Producteur d’or noir depuis décembre 2010, le Ghana aurait pu espérer couvrir la dérive de ses dépenses et la baisse de ses recettes par ces nouvelles ressources. Mais la production n’a toujours pas atteint le niveau espéré de 120.000 barils par jour. « Et dans les premières années, 90 % à 95 % des gains reviennent aux compagnies pétrolières afin qu’elles couvrent leurs investissements. Pas à l’État », précise Angus Downie. Résultat : au déficit fiscal public s’est ajoutée une spectaculaire dégradation de la balance courante, dont le solde est passé en deux ans de – 5 % à – 13 % environ en 2013.

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